Destination Storfjorden / Spitsberg Est

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Longyearbyen, 23 sept. 2004
L’aventure commence dix jours auparavant lorsque Frank, océanographe à UNIS, me parle de la prochaine croisière du voilier Vagabond dans le Storfjorden, au sud-est du Spitsberg. Trois jours plus tard, je m’embarquais pour une semaine de voile et plus de 400 miles nautiques dans les mers et moult fjords qui encerclent le Svalbard.

Vagabond (
www.vagabond.fr) c’est le bateau d’Eric Brossier et France Pinczon du Sel. Un voilier conçu pour affronter les glaces de l’arctique et réaliser les défis incroyables dont rêvaient France et Erik. Depuis quelques années leurs projets se sont concrétisés par plusieurs expéditions au Groenland et un tour complet de l’arctique.
Cette année ils ont choisi de lier aventure et science en décidant hivernant sur la côte Est du Spitsberg, dans le Storfjorden. Leur bateau se trouvera pris dans les glaces de fin-octobre à juin, il servira de camp de base à plusieurs expéditions scientifiques qui auront lieu au printemps dans la région.

Pour les néophytes et les adeptes de climats plus exotiques, la côte Est du Spitsberg c’est un endroit sauvage, à des centaines de km de toute civilisation, parsemé de pics englacés, habité seulement par quelques milliers d’ours blanc.


Vagabond le soir du dé part, Longyearbyen


Avant le départ définitif pour leur hivernage, France et Eric avaient planifié une première reconnaissance des lieux et c’est ce petit bout d’aventure que j’ai eu la chance de partager avec eux. Jean-Claude Gascard, océanographe et spécialiste de l’arctique complète la fine équipe et supervisera les observations scientifiques réalisées à l’occasion de cette première sortie.



Jeudi 16 sept.
Départ de Longyearbyen en fin de journée après un dîner copieux au resto ‘Huset’, visiblement un plat traditionnel norvégien, constitué de viande super-salée et d’une sorte de boulette de pomme de terre super-dense. Bourratif à souhait !
Sortie de l’Isfjorden dans la soirée, la mer est calme, vent faible. Je reste pour le premier quart avec Eric, ce qui est l’occasion de faire plus ample connaissance, d’évoquer ses nombreux voyages à travers le monde, à vélo, en raft, en Kayak, à cheval, du Kamchatka aux Kerguelen !

 


Vendredi 17 sept.
Levé à 5h pour prendre le quart. La brume s’est levée et le paysage est plutôt monotone, la côte ressemble à une photo en noir et blanc, ciel gris, roches noires, neige fraîche par endroits…
L’équinoxe est proche mais les jours sont encore longs à ces latitudes, bien que le soleil ne soit pas visible directement, une lueur est perceptible la plupart de la ‘nuit’.
Nous traversons les différents fjords de la côte Ouest dans la journée, Bellsund, Hornsund et parvenons finalement au cap sud en soirée.
La mer est suffisamment calme pour tenter un passage en rase-cailloux entre les îles au large du cap. Une opération délicate au vu du peu de précision qu’offrent les cartes marines locales…
Jean-Claude et France sont postés à l’avant pour repérer les haut-fonds dangereux, Eric surveille le radar. Malgré une ou deux surprises de dernière minute, on parvient à sortir de la passe sans toucher.




Samedi 18 sept.
Peu avant le changement de quart de 5h, les moteurs calent. Il semble qu’un objet non identifié se balade dans le réservoir et vienne régulièrement bloquer le circuit. Visite forcée de la salle des machines pour Eric, à la sortie du duvet, ce qui s’avèrera plus tard être la source d’une sacrée crise de mal de mer !
Dans l’après-midi nous arrivons à Kvalvågen qui avait été repéré comme un abri potentiel pour l’hivernage. La météo s’est dégradé, la visibilité est faible et pour finir une houle sud-est commence à se former. Le coin ne semble pas très accueillant car directement exposé au vent et à la houle.
On décide ensuite de fuir vers l’Est, en direction de Edgeøya, pour éviter le gros temps. Je commence à être sérieusement malade en soirée, impossible d’avaler quoi que ce soit.








Dimanche 19 sept.
Au matin le ciel se dégage, laissant apparaître quelques rayons de soleil sur les collines de Edgeøya, couvertes neige fraîche. Nous profitons de cette accalmie pour réaliser la partie scientifique de notre périple, en 10 positions reparties à travers le grand Storfjord nous réalisons des profils de température et de salinité, en descendant une ‘batisonde’ depuis le bateau.
En fin de journée la mer devient trop forte pour réaliser les manips et à part Jean-Claude qui semble avoir de l’énergie à revendre, l’ambiance générale est plutôt mal de mer et fatigue. Personnellement, je n’ai rien avalé depuis vendredi soir !
La décision est prise de quitter les lieux et de rejoindre la côte Ouest au plus vite. 50 miles nautiques nous séparent du cap sud, d’ici là, aucun abri ! La nuit s’annonce dure…





Lundi 20 sept. « La nuit de la mirabelle »
Durant la nuit le vent forci jusqu’à 30-35 nœuds et la mer est maintenant joliment formée avec des creux de 2,3 mètres et de bonnes risées. Eric et moi sommes complètement malade, la dernière heure du quart semble s’éterniser ! « Un vrai purgatoire ! »
Durant le quart de France et Jean-Claude une bouteille de mirabelle est éjectée d’un placard et explose littéralement dans le carré. Pour compléter le tableau, au petit matin, on perd l’annexe qui était à la traîne depuis 2 jours (descendu pour faciliter les manips). Eric, France et Jean-Claude mettent à profit leurs dernières forces pour la récupérer. Pas évident vu les conditions, je croyais franchement que s’était peine perdue, mais ils s’en sortent étonnamment bien après une demi-heure d’efforts.
Je barre une bonne partie de la fin du quart du matin, exténué mais motivé par l’approche du cap sud et du calme que l’on devrait retrouver sur la côte Ouest.
Dans l’après-midi traversée de Hornsund, la mer a retrouvé un calme relatif, le vent souffle toujours avec des rafales jusqu’à 43 nœuds. La décision est prise de passer la nuit au mouillage, au pied du gigantesque glacier Torellbreen, quel bonheur de pouvoir manger à nouveau et dormir sans avoir à se cramponner à sa couchette !





La fameuse annexe...


 



En communication avec la France!


Mardi 21 sept.
Beau temps et superbes paysages le long de la côte Ouest. Toujours pas mal de vent et surtout ‘l’effet fjord’ avec des rafales locales à 40 nœuds. Arrivée à Longyearbyen mercredi à 4h du mat.


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